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Bundesgericht 
Tribunal fédéral 
Tribunale federale 
Tribunal federal 
 
 
 
 
9C_299/2025  
 
 
Arrêt du 8 août 2025  
 
IIIe Cour de droit public  
 
Composition 
Mme et MM. les Juges fédéraux 
Moser-Szeless, Présidente, 
Parrino et Beusch. 
Greffier : M. Bürgisser. 
 
Participants à la procédure 
A.A.________et B.A.________, 
représentés par Me Michel Lambelet, avocat, 
recourants, 
 
contre  
 
Administration fiscale cantonale du canton de Genève, 
rue du Stand 26, 1204 Genève, 
intimée. 
 
Objet 
Impôts cantonaux et communaux du canton de Genève, périodes fiscales 2018 et 2019, 
 
recours contre l'arrêt de la Cour de justice de la République et canton de Genève du 1er avril 2025 (A/1657/2023-ICC - ATA/372/2025). 
 
 
Faits :  
 
A.  
 
A.a. Les époux A.A.________ et B.A.________ (ci-après: les contribuables) étaient domiciliés dans le canton de Genève où ils étaient assujettis de manière illimitée à l'impôt sur le revenu et sur la fortune notamment en 2018 et 2019. À cette époque, B.A.________ détenait l'intégralité du capital-actions de C.________ SA (ci-après: la Holding), non cotée en bourse, dont il était l'administrateur unique avec signature individuelle.  
Le but statutaire de la Holding était notamment la reprise, la détention et la mise en valeur du capital-action de D.________ SA (ci-après: la Société), qui exploitait [...] dans le canton de Genève et qui est, depuis décembre 2023, en liquidation. 
Avant la création de la Holding, B.A.________ détenait dans sa fortune privée la totalité des actions de la Société, dont il était administrateur unique avec signature individuelle. 
 
A.b. Divers litiges sont survenus entre les contribuables et l'Administration fiscale cantonale du canton de Genève (ci-après: l'Administration fiscale) au sujet de la valorisation des actions de la Société.  
S'agissant en particulier de la période fiscale 2008, le Tribunal fédéral a, par arrêt 2C_866/2019 du 27 août 2020, rejeté le recours de A.A.________ et B.A.________ portant sur l'évaluation des titres de la Société telle qu'effectuée par l'Administration fiscale. Il a en particulier retenu qu'il n'y avait pas lieu de s'écarter de la méthode d'évaluation préconisée par la Conférence suisse des impôts (CSI) dans sa circulaire n° 28 du 28 août 2008 (ci-après: Circulaire 28) pour les sociétés avec une valeur de rendement inaliénable ou difficilement aliénable et appliquée par l'Administration fiscale. Pour les périodes fiscales 2009 à 2013, le Tribunal fédéral a également rejeté le recours des contribuables dans la mesure où il était recevable (arrêt 9C_669/2022 du 24 août 2023). 
 
A.c. Par bordereau du 20 janvier 2021, l'Administration fiscale a procédé à la taxation des contribuables pour l'impôt cantonal et communal (ci-après: ICC) des années fiscales 2018 et 2019. En se référant à la Circulaire 28, elle a retenu une valeur des actions de la Holding de 3'573'000 fr. pour l'année 2018 et de 2'385'400 fr. pour l'année 2019.  
Statuant sur réclamation le 31 mars 2023, l'Administration fiscale a maintenu la taxation s'agissant de la valorisation des actions de la Holding, pour autant que ce point fût encore litigieux. 
 
B.  
 
B.a. Par jugement du 24 juin 2024, le Tribunal administratif de première instance de la République et canton de Genève (ci-après: le TAPI) a rejeté le recours des contribuables.  
 
B.b. Saisie d'un recours des contribuables, la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative (ci-après: la Cour de justice), l'a rejeté par arrêt du 1er avril 2025.  
 
C.  
Agissant par la voie du recours en matière de droit public, A.A.________ et B.A.________ concluent à la réforme de l'arrêt cantonal du 1er avril 2025, à ce qu'il soit constaté que la Cour de justice a violé leur droit d'être entendu en ayant refusé de faire procéder à une expertise pour déterminer la valeur vénale des titres de la Holding et à ce qu'il soit dit qu'une "expertise doit être diligentée". Ils concluent également à ce qu'il soit dit que "c'est à bon droit [qu'ils] ont contesté la valeur des titres retenue" pour fixer l'ICC des années 2018 et 2019 et demandent le renvoi de la cause "à l'autorité inférieure" pour nouvelles décisions ICC 2018 et 2019. 
Après que l'Administration fiscale a conclu au rejet du recours, les contribuables se sont encore déterminés. 
 
 
Considérant en droit :  
 
1.  
 
1.1. L'arrêt attaqué a été rendu en dernière instance cantonale par un tribunal supérieur (art. 86 al. 1 let. d et al. 2 LTF), dans une cause de droit public (art. 82 let. a LTF) qui ne tombe pas sous le coup des exceptions de l'art. 83 LTF. La voie du recours en matière de droit public est donc ouverte (cf. aussi art. 73 al. 1 LHID; RS 642.14).  
 
1.2.  
 
1.2.1. Conformément à l'art. 42 al. 1 LTF, le recours doit contenir des conclusions, c'est-à-dire indiquer quels sont les points du dispositif de l'arrêt attaqué qui sont contestés et quelles sont les modifications demandées. En matière fiscale, les conclusions ne doivent pas obligatoirement être chiffrées, mais doivent être suffisamment précises pour permettre de déterminer ce que conteste le contribuable et surtout de quelle façon il demande à être imposé. Des conclusions insuffisantes ont en principe pour conséquence l'irrecevabilité du recours. L'application du principe de la confiance impose toutefois d'interpréter les conclusions à la lumière de la motivation, et l'interdiction du formalisme excessif commande de ne pas se montrer trop strict, en particulier en droit public, dans la formulation des conclusions si, à la lecture du mémoire, on comprend clairement ce que veut le recourant (cf. arrêt 2C_137/2022 du 4 novembre 2022 consid. 1.5).  
 
1.2.2. Les conclusions des recourants ne sont pas précises. En l'occurrence, ils se contentent de demander la réforme de l'arrêt cantonal, sans toutefois indiquer dans quelle mesure il doit être modifié. À la lecture du mémoire de recours, on constate toutefois qu'ils reprochent principalement à la cour cantonale d'avoir refusé à tort d'ordonner une expertise s'agissant de la valeur des actions litigieuses. Dans cette mesure, on comprend qu'ils demandent l'annulation de l'arrêt de la Cour de justice et le renvoi de la cause à cette instance afin qu'elle rende une nouvelle décision après avoir mis en oeuvre l'expertise requise. Par ailleurs, on parvient à comprendre qu'à titre subsidiaire, ils demandent la réforme de l'arrêt attaqué, en ce sens que la valeur des actions de la Holding soit fixée à une valeur inférieure à celle fixée par l'intimée; selon eux, la cour cantonale aurait violé les règles cantonales sur l'estimation de biens à leur valeur vénale et une expertise sur la valeur des actions litigieuses parviendrait à une valeur inférieure pour les années fiscales 2018 et 2019 à celle retenue par l'intimée (soit 3'573'000 fr. en 2018 et 2'385'400 fr. en 2019). Dans cette mesure, les conclusions sont recevables.  
 
1.2.3. En revanche, les conclusions des recourants tendant à ce qu'il soit constaté qu'il y a eu violation de leur droit d'être entendus par la juridiction cantonale et qu'il soit dit que c'est "à bon droit [qu'ils ont] contesté la valeur des titres" retenue pour fixer l'ICC des périodes fiscales 2018 et 2019 sont irrecevables, puisqu'elles constituent des conclusions "préparatoires" qui peuvent conduire à l'annulation, respectivement à la réforme de l'arrêt déféré (cf. ATF 148 I 160 consid. 1.6 et les références).  
 
2.  
 
2.1. D'après l'art. 106 al. 1 LTF, le Tribunal fédéral applique le droit d'office. Il examine en principe librement l'application du droit fédéral ainsi que la conformité du droit cantonal harmonisé et de sa mise en pratique par les instances cantonales aux dispositions de la LHID (cf. ATF 150 II 346 consid. 1.5.2; arrêt 2C_826/2015 du 5 janvier 2017 consid. 2, non publié in ATF 143 I 73).  
 
2.2. Le Tribunal fédéral conduit son raisonnement juridique sur la base des faits constatés par l'autorité précédente (art. 105 al. 1 LTF), hormis dans les cas prévus à l'art. 105 al. 2 LTF. Selon l'art. 97 al. 1 LTF, le recours ne peut critiquer les constatations de fait que si les faits ont été établis de façon manifestement inexacte - notion qui correspond à celle d'arbitraire (art. 9 Cst.) - ou en violation du droit au sens de l'art. 95 LTF et si la correction du vice est susceptible d'influer sur le sort de la cause (ATF 150 II 346 consid. 1.6 et les références).  
 
3.  
Le litige porte sur la détermination de la valeur des actions de la Holding non cotée en bourse, dont B.A.________ est l'actionnaire unique, aux fins de l'imposition sur la fortune des recourants pour les périodes fiscales 2018 et 2019. Il porte en particulier sur le point de savoir si c'est à bon droit que la Cour de justice a refusé d'ordonner une expertise pour déterminer la valeur desdites actions. 
 
4.  
 
4.1. La Cour de justice a retenu que selon la jurisprudence du Tribunal fédéral (cf. ATF 148 I 210 consid. 4.4.3; arrêt 9C_669/2022 du 24 août 2023 consid. 4.3), la détermination ou l'évaluation de la valeur des titres concernait le fond du litige et non pas le droit d'être entendu d'un contribuable, car la notion de valeur vénale relevait d'une question de droit alors que le prix effectivement obtenu relevait d'une question de fait.  
Elle a par ailleurs considéré que le montant du transfert des actions en cause n'était aucunement contesté et que ce transfert ne s'était pas effectué entre tiers indépendants, ni même simplement entre tiers puisque le recourant était l'unique actionnaire des deux sociétés. Le choix de la méthode d'évaluation étant une question de droit qu'il incombait aux juridictions administratives de trancher, les juges cantonaux ont considéré qu'il n'était en l'occurrence pas envisageable de mandater un expert, car le calcul de la valeur des titres sur la base de la méthode choisie ne posait pas de questions techniques hors de portée du juge. La demande de mise en oeuvre d'une expertise devait donc être rejetée. 
 
4.2. Le droit d'être entendu (art. 29 al. 2 Cst.) comprend le droit pour le justiciable d'obtenir qu'il soit donné suite à ses offres de preuves pertinentes, lorsque cela est de nature à influer sur la décision à rendre (cf. ATF 148 II 73 consid. 7.3.1; 145 I 167 consid. 4.1). Cette garantie constitutionnelle n'empêche pas le juge de mettre un terme à l'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa conviction et que, procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, il a la certitude que ces dernières ne pourraient pas l'amener à modifier son opinion (ATF 145 I 167 consid. 4.1; 140 I 285 consid. 6.3.1). Le refus d'une mesure probatoire par appréciation anticipée des preuves ne peut être remis en cause devant le Tribunal fédéral qu'en invoquant l'arbitraire (art. 9 Cst.) de manière claire et détaillée (art. 106 al. 2 LTF; ATF 146 III 73 consid. 5.2.2; 144 II 427 consid. 3.1.3).  
 
4.3. Les recourants reprochent à la juridiction cantonale de s'être fondée sur l'ATF 148 I 210 pour "prétendre" que le choix de la méthode d'évaluation serait une question de droit, car selon eux "la juste valeur fiscale est une notion de fait puisque le prix" le serait également. Ils en concluent qu'en l'occurrence une question de fait serait "controversée", de sorte que le refus de la juridiction cantonale violerait leur droit à la preuve déduit de l'art. 29 al. 2 Cst. Ils soutiennent également qu'au consid. 4.4 de son arrêt 2C_866/2019 (rendu entre les mêmes parties, mais au sujet de l'évaluation des actions de la Société pour la période fiscale 2008), le Tribunal fédéral n'excluait "toutefois pas que d'autres méthodes d'évaluation reconnues puissent, isolément, s'avérer appropriées". Partant et puisque des autres méthodes étaient envisageables, une expertise judiciaire s'avérait d'autant plus nécessaire. Même à supposer que le prix déterminé par la Circulaire 28 fût une question de droit (ce qu'ils contestent), les recourants soutiennent qu'il n'en demeurerait pas moins que la question de déterminer si ce prix peut être effectivement obtenu sur un marché libre serait une question de fait nécessitant une expertise. Par ailleurs, le juge administratif ne disposerait pas des connaissances spécifiques pour établir l'impact de la liquidation en décembre 2023 de la Société sur la détermination du prix que les titres de la Holding pourrait atteindre dans le contexte d'une vente entre tiers, élément factuel que les juges précédents auraient omis à tort de prendre en considération. Bien que ce fait fût postérieur aux années fiscales litigieuses, les recourants voient une analogie entre la présente situation et celle de l'établissement du bilan d'une société, soit un élément "non apparu avant la date de clôture du bilan, mais connu lors de l'établissement du bilan". En outre et selon les contribuables, les "divers ATF" auxquels se référait l'administration fiscale concernaient des périodes fiscales antérieures et ne s'étaient "pas prononcé[s] sur la nécessité d'une expertise expressément requise".  
 
4.4. En premier lieu, quoi qu'en disent les recourants, le Tribunal fédéral a déjà eu l'occasion de leur indiquer que la valeur vénale au sens de l'art. 14 LHID constitue une notion juridique indéterminée qui relève du droit et que la détermination de cette valeur ne concernait pas leur droit d'être entendu mais bien le fond du litige (arrêt 9C_669/2022 du 24 août 2023 consid. 4.3 et 5). On rappellera par ailleurs que selon la jurisprudence, le point de savoir si l'autorité précédente a employé une méthode d'évaluation appropriée constitue également une question de droit (arrêts 2C_309/2013 et 2C_310/2013 du 18 septembre 2013 consid. 2.3.1 in RDAF 2014 II 347). Partant, les recourants ne peuvent pas être suivis lorsqu'ils prétendent que le choix de la méthode d'évaluation ne serait pas une question de droit et que la Cour de justice, en ayant retenu l'inverse, aurait violé leur droit d'être entendus; ils ne présentent d'ailleurs aucun motif pertinent qui permettrait de s'écarter des principes dégagés par la jurisprudence tels qu'ils viennent d'être mis en évidence (sur les conditions d'un changement de jurisprudence, cf. ATF 149 III 28 consid. 6.2.3.1 et la référence).  
Pour le surplus, les recourants n'établissent pas que l'appréciation anticipée des preuves telle qu'effectuée par la cour cantonale serait arbitraire. Ils ne démontrent pas en quoi le raisonnement des juges cantonaux, selon lequel la présente cause ne comporterait pas de questions techniques hors de portée du juge, serait insoutenable; en particulier, ils se limitent à alléguer en vain qu'il faudrait une expertise pour vérifier que le prix déterminé sur la base de la Circulaire 28 puisse "effectivement être obtenu dans un marché libre". Lorsqu'ils soulignent le besoin de connaissances spécifiques qui seraient liées à l'influence de la liquidation de l'"actif sous-jacent" (soit la mise en liquidation de la Société en décembre 2023) sur la valorisation des actions de la Holding, ils ne s'en prennent pas au raisonnement convaincant de la juridiction cantonale sur ce point, à savoir que ce fait intervenu en 2023 ne pouvait avoir d'influence sur la valeur vénale des actions litigieuses en 2018 et 2019. Pour le surplus, l'analogie qu'ils font entre la présente situation et celle des faits qui peuvent être pris en compte jusqu'à l'établissement du bilan est sans pertinence, puisqu'il n'est en l'occurrence pas question de savoir si une provision est justifiée commercialement en lien avec une certaine période fiscale (sur cette question, cf. par exemple arrêt 9C_452/2024 du 15 juillet 2025 consid. 4.2.1 et les références). 
 
4.5. En définitive, le grief tiré de la violation de l'art. 29 al. 2 Cst. par la Cour de justice doit être écarté.  
 
5.  
En se limitant par ailleurs à alléguer qu'une expertise déterminerait "avec certitude" des valeurs plus faibles que celles retenues par l'intimée les recourants ne démontrent pas, contrairement à ce qu'ils prétendent, que la juridiction cantonale aurait arbitrairement appliqué l'art. 49 al. 2 de la loi cantonale genevoise du 27 septembre 2009 sur l'imposition des personnes physiques (LIPP; rs/GE D 3 08) qui prévoit, en conformité à l'art. 14 LHID, que "la fortune est estimée, en général, à la valeur vénale". 
 
6.  
Compte tenu de ce qui précède, le recours qui est entièrement mal fondé doit être rejeté. Les recourants, qui succombent, supporteront les frais de la procédure fédérale (art. 66 al. 1 et 5 LTF). Il n'y a pas lieu d'allouer des dépens (art. 68 al.1 et 3 LTF). 
 
 
Par ces motifs, le Tribunal fédéral prononce :  
 
1.  
Le recours est rejeté, dans la mesure où il est recevable. 
 
2.  
Les frais judiciaires, arrêtés à 3'500 fr., sont mis à la charge des recourants. 
 
3.  
Le présent arrêt est communiqué aux parties et à la Cour de justice de la République et canton de Genève, Chambre administrative. 
 
 
Lucerne, le 8 août 2025 
 
Au nom de la IIIe Cour de droit public 
du Tribunal fédéral suisse 
 
La Présidente : Moser-Szeless 
 
Le Greffier : Bürgisser